Du TOTALITARISME

Publié le par Pim

Tandis que l’ensemble des mais dis ah ! se répand dans la fange d’une apologétique de telle vedette de son répugnant spectacle, nos yeux se tournent vers d’autres sources rafraîchissantes, reposantes pour l’esprit fatigué de tant de bruit de bottes et de propagande.

L’article de C.Guillon remet en évidence la bonne vieille méthode des procureurs de tous les despotismes du monde et de tous les temps : quand il n’y a pas de faits concrets, seules restent les allégations, les fantasmes, les "idées" comme pièces d’un procès à charge.

Les idées deviennent denrée rare en ce monde qui les a chassées, puisqu’il est désormais entendu qu’elles seraient parfaitement INUTILES. “Prendre la tête” n’est-elle pas l’expression symptomatique de cette époque (au détriment de celle, plus "physique", du  “casser les burnes”) quand, en effet, tout aujourd’hui s’ingénie à occuper ce qui nous reste de part de cerveau, pour le plus grand bénéfice du marché ?
Inutiles en effet, puisque l’esprit vient aux filles, c’est bien connu, avec leurs premiers émois. Qui, aujourd’hui, prend le risque d'éprouver encore  de l’émoi, TOUT étant prévu en notre monde, se voit aussitôt cerné par une batterie de spécialistes qui étudient le phénomène sous leurs microscopes, avant que d'autopsier la partie incriminée. Et quand il se trouve qu’un impondérable se présente, une cellule psychologique aussitôt surgit, miraculeusement, afin que nul ne sombre dans les affres du doute sur le bien-fondé de ce monde et de ses “garanties”.

Orwell, observateur des évolutions de son temps, met en évidence que le monde des idées doit se confondre en un seul cours, celui du système qui les emploie au seul usage de son maintien.
Dans son livre, 1984, le personnage principal travaille à supprimer toutes les traces historiques qui ne correspondent pas à l'Histoire Officielle, qui doit toujours correspondre à ce que prédit Big Brother.
La liberté d'expression en tant que telle n’existe plus. Toutes les pensées sont minutieusement surveillées.
Pour ce faire la police de la pensée débusque toute émergence de celle-ci par un système de surveillance ad hoc et une main mise sur le langage, le novlangue visant à la destruction de l'ancien, de sorte qu’aucune pensée ne puisse plus se formuler.

En cela au moins, il rejoint la réflexion d’Hannah Arendt sur le totalitarisme, qui le voit comme une dynamique de destruction de la réalité et des structures sociales, plus qu’un régime fixe. Un mouvement totalitaire est «international dans son organisation, universel dans sa visée idéologique, planétaire dans ses aspirations politiques ». Le régime totalitaire, selon Arendt, recherche la domination totale, sans limites.
Les fondements des structures sociales ont été volontairement sabotés ou détruits par l’application croissante de mesures de coercition, afin de reconstruire cette société et l’homme lui-même en fonction de certaines conceptions « idéales » définies par l’idéologie.
La terreur devient donc une conséquence inévitable, ainsi qu’un instrument, du programme révolutionnaire. Ainsi les camps pour la jeunesse ont contribué à saboter l'institution familiale en instillant la peur de la délation à l'intérieur même des foyers.

Selon Raymond Aron, le totalitarisme qualifie les systèmes politiques dans lesquels s'accomplit « l'absorption de la société civile dans l'État » et « la transfiguration de l'idéologie de l'État en dogme imposé aux intellectuels et aux universités ». L'État, relayé par le parti unique, exercerait en ce sens un contrôle total sur la société, la culture, les sciences, la morale jusqu'aux individus mêmes auxquels il n'est reconnu aucune liberté propre d'expression ou de conscience.
La bureaucratie est consubstantielle du totalitarisme. Tout cela a pour but de supprimer toute hiérarchie entre le chef et les masses, et garantir la domination totale, sans aucun obstacle la relativisant. Le chef commande directement et sans médiation tout fonctionnaire du régime, en tout point du territoire.
Des individus réduits à l’état d’atomes se retrouvent seuls face à l’État aperçu, de ce fait, comme omnipotent.
("L'Etat a tous les droits, l'État a toujours raison, même quand il a tort", ce que certains résument par la Raison d'État).

L'État totalitaire méne une « révolution permanente » aux cinq caractéristiques fondamentales : (1) un parti unique contrôlant l'appareil d'État et dirigé par un chef charismatique ; (2) une idéologie d'État promettant l'accomplissement de l'humanité ; (3) un appareil policier recourant à la terreur ; (4) une direction centrale de l'économie et ; (5) un monopole des moyens de communication de masse.

Il ne s'agit pas seulement de contrôler l'activité des hommes, comme le ferait une dictature classique : un régime totalitaire tente de s'immiscer jusque dans la sphère intime de la pensée, en imposant à tous les citoyens l'adhésion à une idéologie obligatoire, hors de laquelle ils sont considérés comme ennemis de la communauté.

Contrairement aux dictatures traditionnelles (militaires ou autres), le totalitarisme n'utilise pas la terreur dans le but d'écraser l'opposition. La terreur totalitaire ne commence réellement que lorsque toute opposition est écrasée. Même si le groupe considéré comme un ennemi a été anéanti (par exemple les trotskistes en URSS), le pouvoir en désignera continuellement un autre.

Les régimes totalitaires se distinguent des régimes autoritaires et dictatoriaux par leur usage permanent de la terreur, contre l'ensemble de la population (y compris les « innocents » aux yeux même de l'idéologie en vigueur) et non contre les opposants réels. L'usage permanent de la terreur a pour corollaire celui de la propagande, omniprésente dans un État totalitaire.

On peut y ajouter comme autres aspects pratiques, la prise en main totale de l'éducation pour la baser sur l'idéologie et la mise en place d'un réseau omniprésent de surveillance de l'individu.
Le 10 mai 1933 à Berlin, le régime nazi reprit à son compte l’autodafé, qui consistait, à l'origine, à brûler des livres considérés comme païens, blasphématoires ou immoraux, proclamation solennelle, au Moyen Âge, d'un jugement prononcé par l'Inquisition,  et dont l'exécution conduisait le coupable à sa destruction, mort ou vif, par le feu.

« Là où on brûle des livres, on finit aussi par brûler des hommes.  » (Heinrich Heine, Almansor).


Ce collage d'éléments, en partie tirés d’articles de l'encyclopédie en ligne wikipédia, devraient permettre d'éclairer les évolutions constatées dans les “démocraties” occidentales, au moins depuis le 11 septembre 2001 aux États-Unis, et les conséquences qui s’ensuivirent en termes de “protection” du citoyen (au sens où les souteneurs protègent leurs revenus sur pattes), c’est-à-dire de destruction de ses libertés constitutionnelles, qui bien que formelles, laissaient supposer encore trop d’autonomie dans les temps de bouleversements qui s’avancent.

À la faveur de cette “crise”, la crispation policière jusqu'à la terreur laisse se dévoiler à tous, ou presque, le totalitarisme.
Pour autant, ce serait une erreur grossière que de réduire celui-ci à son symptôme, quand nous n'apercevons alors que la pointe d'un iceberg qui s’enfonce dans les eaux profondes de la vie sociale et du quotidien de chacun.

Le totalitarisme qui nous contient est celui de la marchandise, qui s’est saisi de la vie pour la pétrifier et ne tolère plus d’autre mode d’être en ses terres, tout en cherchant, en permanence, à revivifier celles-ci, à y faire resurgir la vie dont elle ne saurait se passer.
Telle est la contradiction qui mine la marchandise, qui doit sans cesse proclamer que cette vie existe, l'hypostasier, la simuler de manière hystérique, jouer avec le feu dont elle parvient, jusqu’à preuve du contraire, à se saisir, prétendant donner l’illusion de sa maîtrise. Le mensonge est son âme, comme il est devenu l'arme du pouvoir qui la gère.
“Dans le monde réellement renversé, le vrai est un moment du faux” (G. Debord “La société du spectacle” thèse 9 Paris, 1967)


Publié dans De la Guerre

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