Délit de rire, ou la fabrique de l'antisémitisme

Publié le par Pim

Modifié le 3/01/14 (Notes)

 

En France, "patrie des droits de l'Homme", dit-on (si ! si !), voici que l'"Homme" vient d'en perdre un sous ce gouvernement "social"-nationaliste, celui de rire de tout, avant que ce ne soit le droit de rire du tout.

 

"Le ministère de l'intérieur a fait savoir, vendredi 27 décembre, qu'il étudiait « toutes les voies juridiques » pour interdire les « réunions publiques » de l'humoriste Dieudonné"

« J'entends agir avec la plus grande fermeté, dans le cadre de la loi (...) Quand Dieudonné insulte la mémoire des victimes de la Shoah, c'est insoutenable. Ça suffit. Il faut casser cette mécanique de haine »

http://www.lemonde.fr/societe/article/2013/12/28/la-tournee-de-dieudonne-dans-le-viseur-du-ministere-de-l-interieur_4341066_3224.html

 

"L'hôpital qui se fout de la charité", comme le dit le dicton.

C'est-à-dire que M. Valls, qui, pour sa part, ne nous a jamais fait savoir qu'il riait de quoi que ce soit, se permet, en tant que ministre de l'Intérieur - un exemple, donc, en la matière - de se montrer raciste envers une population qu'il stigmatise et désigne à la vindicte, aux traitements dégradants, humiliants qui s'ensuivent, y compris pour les jeunes enfants et les familles qui se trouvent ainsi disloquées, la population Romani, en l'occurrence - pour ne parler que d'elle ; car on n'évoquera pas ici les vexations coutumières, quotidiennes que subissent de la part de la police dite républicaine les enfants et les jeunes "coupables" du délit de faciès dans les zones désignées "sensibles" (!) - sans être le moins du monde inquiété ; mais un humoriste, un comique, donc, dont le métier est de FAIRE RIRE, et qui a toujours prétendu que l'on pouvait, que l'on devait même RIRE DE TOUT, se trouve, quant à lui, poursuivi, empêché d'exercer son métier, son travail, au motif qu'il irrite par ses propos UNE catégorie de population fort minoritaire en France, mais particulièrement susceptible au point de prétendre y dicter SA loi.

 

On se rappellera que sur le même registre, pourtant, les média ont largement soutenu le journal satirique Charlie Hebdo, parti en croisade du rire contre les prophète Mahomet des musulmans. Qui a trouvé alors à y redire ?

 

Nous voici donc, en France, sous le registre du deux poids, deux mesures, et ce sont des avocats eux-mêmes qui défendent cette justice pour le moins partiale, cette parodie de justice, cette INJUSTICE là.

 

Voici donc la France, pays laïc, à devoir défendre une religion particulière, ou, pour le moins, à devoir valider qu'il y ait en France des TABOUS(1), des sacrilèges, à valider donc ce qui existe, en effet, dans les systèmes de CASTES, dans lesquels les brahmanes ne doivent pas même être regardés par les dits intouchables, des "impurs" ; à devoir valider ce qui existait sous l'Ancien Régime, avant que le peuple français ne s'avise qu'avaient assez duré l'arrogance et la morgue des aristocrates, avant que leur tête ne tombe, ainsi que celle de leur roi roulant dans la poussière.

 

De quoi donc se prévalent ces empêcheurs de rire de leurs malheurs ? Qu'y pouvons-nous, nous autres, si eut lieu un sacrifice humain tel que l'holocauste (dont le terme fut remplacé par celui de shoah, intraduisible) ? On nous dit qu'il serait interdit d'en rire, voire même d'en parler au motif qu'il ne faut pas que cela recommence !...

FOUTAISES ! Non seulement ce sacrifice est, bien plutôt qu'exceptionnel, le quotidien même de l'Histoire sanglante  opposant dominants et dominés, mais, aussi bien, c'est précisément parce que l'on n'arrête pas de nous bassiner depuis SOIXANTE-DIX ANS maintenant avec cet évènement que l'on peut éprouver le besoin de s'en soulager par le rire.

 

Le rire est le commencement de l'intelligence, le contraire de la soumission aux exigences imposées par d'autres qui veulent maintenir l'OMERTA, le grand silence sur les raisons qui ont présidé à un tel sacrifice.

Pourquoi n'est-il jamais indiqué que le capitalisme, comme système d'exploitation des hommes, a armé le nazisme, qui ne fut que son éxécuteur des basses œuvres ? Le nazisme, d'abord et avant tout dressé contre le prolétariat, a opéré ce sacrifice comme expiatoire d'une crise que subissaient les pauvres. C'est en désignant les juifs à la vindicte populaire, comme responsables de tous les maux qu'ils subissaient, que le capitalisme a sauvé sa peau.

 

Mais aujourd'hui qu'aperçoit-on des descendants affirmés de ces sacrificiés ? Que le capitalisme, jusque dans ses pires manifestations, est tout à fait honorable.

L'État sioniste, défendu par tous ces accusateurs du rire, par tous ces faiseurs de tabous, s'est allié avec l'Afrique du Sud de l'apartheid, pratique lui-même l'apartheid sur le territoire arraché à une population qui y demeurait depuis des siècles en l'expulsant manu militari au nom d'un mythe religieux. Les victimes se sont faites bourreaux et prétendent  interdire aujourd'hui toute critique à leur égard.

Car la réalité est bien celle-ci : ce n'est pas le passé que ces tristes figures défendent. Ce n'est pas non plus l'avenir qu'ils préservent d'un retour possible du même, car alors ils se seraient opposés à la barbarie qui s'avance désormais au point de dépasser en horreur et en capacité de destruction tout ce qui a prévalu jusqu'alors.

Ce qu'ils défendent becs et ongles, par l'interdiction du rire, de l'intelligence, de la critique, CE SONT LEURS SEULS INTÉRÊTS DU MOMENT, dont ils usent et abusent au point de revigorer, de fabriquer même l'antisémitisme, sur lequel ils misent en effet, non seulement comme un moyen d'augmenter la proportion de juifs en Israël face à la population autoctone arabe, mais aussi bien comme une attitude appliquée sans vergogne à l'égard des populations sémites de Palestine occupée.

 

Ce n'est pas un effet du hasard que le terme même d'antisémitisme ne soit plus aujourd'hui associé qu'à celui d'anti-israëlisme, car s'est ainsi opérée non seulement la captation d'un terme au seul profit d'une catégorie bien particulière et très minoritaire de sémites une appellation plus que douteuse et devenue, du fait, incontrôlée - quand, par ailleurs la réalité d'un anti-sémitisme dirigé contre les populations arabes n'est même jamais évoquée -, mais en outre s'est aussi opéré, par là-même, un glissement de représentation entre religion et race.

La "race", comme tout le monde est censé le savoir à présent, est un terme qui n'a plus aucune pertinence scientifique pour désigner une catégorie de population. De plus, son usage abusif par le nazisme, après qu'il fût - rappelons-le quand même - fort en faveur avant le nazisme chez les scientifiques prétendant purifier celle-ci des effets de l'industrialisme(2) (ainsi aux Étas-unis, comme en Suède), a définitivement mis hors-jeu une telle référence. C'est bien pourtant sur cette référence que s'appuie EXPLICITEMENT le terme d'antisémitisme, puisque est ici fait référence à la "race juive", comme si celle-ci avait une quelconque réalité, comme si elle était une pure essence à préserver !...

 

Qu'est-ce qu'être juif aujourd'hui ? C'est bien ce que se demande un intellectuel tel que Shlomo Sand (Comment j'ai cessé d'être juif) ? Ce n'est pas appartenir à une race, pas plus qu'à une religion, en dépit des méthodes douteuses employées par l'État sioniste pour désigner et catégoriser ses ressortissants.

C'est pourtant au nom de cette réalité plus que problématique que se dessine un front armé contre l'antisémitisme, au nom d'une mémoire qui n'en pas une, car enfin la Seconde guerre mondiale, en dépit des efforts de ces gens pour la faire apparaître telle dans la représentation que nous devrions aujourd'hui en avoir, n'est pas une guerre dirigée contre les juifs. Ils en ont été victimes comme beaucoup d'autres populations, et s'il fallait vraiment faire un décompte des victimes, ce serait bien plutôt aux Ukrainiens et autres Russes de se plaindre, qui perdirent près de 20 à 25 millions des leurs dans ce carnage. Carnage délibéré, carnage industriel avec des méthodes de la bureaucratie, carnage mettant, pour la première fois dans l'histoire humaine aussi visiblement, l'humain au rang de CHOSE(3).

 

La Seconde guerre mondiale c'est d'abord la réification de l'homme, opérée par le capitalisme, devenue visible.

En quoi les sionistes ont-ils jamais critiqué cette réification ? Bien au contraire. La mise en avant de leur sacrifice industriel comme étant l'UNIQUE élément remarquable de ce carnage est bien plutôt le moyen par lequel disparaît, est mise sous le tapis, la vérité de celui-ci. Voici en quoi, en effet, ils participent de sa survie actuelle et de sa capacité toujours active de nuire, comme ils le prouvent sans cesse par leurs propres agissements.

 

À suivre ...

 

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NOTES, SOURCES & LIENS

 

1 - NOTE du 3/01/14 - On sait que la notion de "tabou", telle qu'analysée par Freud, ressort du registre de la culpabilité du meurtre.

C'est bien de ce registre que ressort celui-ci, consistant à conférer des privilèges exorbitants à une catégorie de population, la plaçant quasiment au-dessus des hommes, au-dessus de leurs lois, ainsi qu'il en est, par exemple, de l'État d'Israêl s'arrogeant le droit de fait de violations du droit international qui vaudraient à n'importe quel autre État une mise au ban assortie de sanctions comme savent en concocter, entre autres les USA, le Royaume-Uni, la France hollandaise ...

La culpabilité ici est celle de ces pays engagés dans la Seconde boucherie planétaire qui a valu aux juifs d'Europe de servir de cobayes à un rite sacrificiel pour sauver le capitalisme. Voici la note que nous semblons devoir régler aujourd'hui, nous autres, qui ne sommes pour rien dans ce rituel.

 

2 - NOTE du 3/01/14 - Faut-il rappeler et insister encore que cette liquidation des juifs d'Europe par les nazis a commencé dans le climat d'une époque euthanasiant sans états d'âme particulier ses malades mentaux ? faut-il souligner combien cette liquidation n'a pu se poursuivre sur les invalides, et incapables au travail sur le motif, ô combien actuel - employé à nouveau sans états d'âme - que l'"on ne peut payer pour des inactifs à nourrir et vêtir" ?

Tout cela commence donc dans le bain du moralisme boutiquier, et ne cessera de se propager le long des neurones d'"honnêtes bureaucrates" se demandant très honnêtement comment améliorer les conditions économiques de tels coûts induits. Il n'est nullement question ici de "volonté de faire souffrir", mais d'une immence chaîne de responsabilité diluée où tout un chacun s'efforce de "réduire les coûts", au seil de laquelle demeure la question de se débarrasser d'une population considérée comme parasitaire, sous l'angle de l'hygiénisme, c'est-à-dire de la force vitale, de la capacité de travail. De ce point de vue, juifs et Slaves étaient alors considérés comme des sous-hommes, utiles en tant que pure force de travail, inutiles en tant qu'invalides par la propagande aryaniste. On voudra bien opérer certains rapprochements  avec des discours aujourd'hui entendus concernant certaines populations ... par ceux-là mêmes, "démocrates" en diable, et même "de gauche", jurant leurs grands dieux : "Plus jamais ça !" 

 

3 - NOTE du 3/01/14 - On voudra bien se rappeler que le camp de concentration d'Auschwitz resta longtemps au seul usage des prisonniers de guerre russes, lesquels furent les premiers à devoir subir les expérimentations de gazage.

Ce n'est qu'en 42, après que fut décidé la "solution finale", et que les prisonniers russes furent retirés du camp pour servir de force de travail en tant qu'esclaves en Allemagne de l'effort de guerre, que le camp fut rempli de juifs d'Europe centrale qui y furent gazés en même temsp que d'autres prisonniers.

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