Vive la valeur !

Publié le par Pim

D'où vient donc le récent engouement manifesté avec tant de prersévérance pour la question de la valeur ?

Serait-ce que les récentes turbulences du capital donnent le goût de s'intéresser à l'économie politique, cette idéologie des marchands aux manettes ?

 

C'est bien ce qui nous semble à considérer la tendance "critique de la valeur", dont on voit, ici et là, se produire quelque vélléité d'en finir avec la valeur, sans que soit précisé, par ailleurs, qui doit se coller à la tâche, au point que l'on imagine assez bien que la chose doive être énoncée par décret : "Oyez ! Oyez ! Demain, par décision des ???, la valeur est supprimée. Chacun vaudra tout le monde et M. tout le monde sera la norme, telle que chiffrée dans les ordinateurs de la norme. Il n'y aura donc plus de classes, et, conséquemment, plus de travail, celui-ci produisant celles-là".

En d'autres termes, le Paradis et St Jappe pour tous. À cet effet, ce monsieur(1) qui, en attendant ce jour béni, se produit beaucoup, donnant toute sa valeur à sa "critique de la valeur", et aussi un peu de publicité autour de son nom. Car la valeur n'attend pas etc ..

 

Tout ceci est fort plaisant, mais quelque peu incertain quand même. Et l'Histoire ne bondit que sur des certitudes. Le chat a beau être souple, il n'a pas envie de se casser la binette.

Or, et jusqu'à preuve du contraire, la valeur demeure une certitude : le monde est hierarchisé en plans qui se valent plus ou moins, qui sont plus ou moins appréciés, qui s'avèrent plus ou moins utiles.

Ainsi que le constatait Asger Jorn, dans "Critique de la politique économique", le capital a socialisé toujours plus ce monde, avec pour fâcheuse conséquence sa dévalorisation accélérée. Ce monde peut bien tenter de s'avancer derrière la bannière de ses valeurs, disait déjà Debord en substance, "il n'y en a plus".

 

Le capital n'a pas inventé la valeur, il s'en est emparé en la quantifiant, ce qui lui a permis d'en extraire sa substantifique moëlle, la qualité, dont il est parvenu à faire une donnée chiffrable. Voilà ce qu'a mis en exergue, et en 3D, le capital, faisant le monde à son image, un monde de la mesure, laquelle n'a que peu à voir avec la valeur.

 

 

 

À l'autre extrémité, ou tout comme, quoique ... à bien considérer ... M. Voyer qui, pour sa part, souhaite et décrète, sans attendre, quant à lui - et il a bien raison ; on n'est jamais si bien servi que par soi-même - la valeur doit être désormais bannie du langage et remplacée par l'utilité.

Il est vrai que la méthode est ici radicale. Le terme n'existant plus, comme l'on sait, sa réalité n'a qu'a bien se tenir dans les souterrains de la conscience et y cheminer comme elle peut, le risque étant, évidemment, qu'elle surgisse soudain sous sa face la plus hideuse.

 

Quand M. Voyer fait disparaître la "valeur" pour lui substituer "l'utilité", il tente bien de revenir à cette qualité. Mais que voilà une qualité bien servile.

Comment mieux donner toute sa valeur à l'utilité ? Comment mieux faire en sorte que soit ainsi entériné que L'ARGENT SERT ceux qui l'emploie, qu'ils ne sauraient se passer de cet "utilitaire général" ? qu'ils servent donc l'argent qui les emploie à sa circulation ?.

Voici donc au moins une marchandise dont la "valeur d'usage" n'est pas absorbée par la "valeur d'échange". Bien au contraire : la valeur d'échange n'y a de valeur qu'en tant que valeur d'usage. Celle-ci n'y sert plus de prétexte à l'échange, dont seule la réalité importerait, mais c'est bien plutôt celle-là qui est désormais le prétexte de celle-ci.

Tel est donc le résultat pour le moins renversant d'un tel glissement sémantique.

 

 

----------------------------------------------------

 

NOTES, SOURCES & LIENS

 

1 - Sans vouloir dévaloriser ce monsieur qui a écrit sur Debord, et doit donc en connaître un rayon sur ce qu'il a pu écrire, nous nous étonnons - en toute bonne foi - de ce que son site - du moins qui s'en revendique -  invente une catégorie "situationnisme", dans laquelle il se situe (Hum ! ... ) pour se faire connaître.

Les situationnistes n'ont-ils pas été assez clairs ? le "situationnisme" n'existe pas. C'est une idéologie. Étonnant, non ?

Publié dans De la Guerre

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article