De l’extravagance langagière

Publié le par Pim


On avait bien eu un aperçu de la chose avec l’équipe précédente, quand le ministre de l’Intérieur, Boutefeu en diable(1), se permettait ses œillades répétées à l’extrême-droite, lâchant devant une caméra de la chaîne publique Sénat, à propos de l’immigré de service dans leur coterie : “Quand il n’y en a un, ça va. C’est quand il y en a plusieurs qu'il y a des problèmes”.

La dernière en date, venue de l’extrême-droite, maniant cette sorte de tentative d’humour si propre à s'éructer du palais des boutiquiers et destinée à séduire le petit peuple dont ils imaginent qu’il ne peut qu'en rire puisqu’il est question d’humiliation, cette sortie intempestive et grasse à souhait, cette provocation(2), donc, n’est pas le privilège des milieux de la droite.
Elle est bien plutôt caractéristique des méthodes de la domination, selon lesquelles il s’agit de taper fort, de sidérer l’adversaire par son extravagance, de sorte à lui montrer qui, de fait, a la liberté des mots, c’est-à-dire du pouvoir, peut tout se permettre sans rien craindre.

C’est ainsi, par exemple, que les milieux sionistes auront, quant a eux, fait le choix de la sidération par la shoah(3), convoquant à tout propos ce sacrifice de masse dont le capitalisme industriel se sera rendu coupable, sans état d’âme aucun, à l’encontre de populations dont il aura pris soin, auparavant, de marteler qu’elles étaient responsables de tous les maux du capitalisme, précisément.
En s’appropriant cette tragédie, comme étant ses “héritiers” légitimes et, à ce titre, ses "ayant-droits", voici donc ces usurpateurs “en droit” - nous dit-on - de faire main basse sur des territoires qui ne leur appartiennent en rien et de martyriser des populations devenues, du fait, “légitimement expropriables”, lesquelles seraient, dès lors, bien mal venues de se plaindre de quoi que ce soit, d’oser se faire passer pour des victimes face à des victimes de l’indicible.

Mais c’est aussi le cas, de fait, de toute domination non fermement assise et qui doit se légitimer par la violence, qu’elle veut verbale - dans un premier temps - puisqu’elle n’a pas les moyens d’un stade supérieur de la violence.
Cette domination entend bien, elle aussi, sidérer et culpabiliser par l’outrance en réduisant l’autre à l’état de nain. Qu’irait-il, par exemple, se plaindre de son sort alors qu’il y a, de par le monde, de “vrais malheurs”, d’”authentiques miséreux” qui n’ont rien à se mettre sous la dent, ou qui ont subi des coups du sort tels, qu’à coté, RIEN ne peut être ramené ou comparé : on a cité la shoah, les rafles, mais c’est aussi, bien sûr le Tiers-Monde qui est le plus souvent ici convoqué, à coté duquel l’Europe est un paradis de nantis et ses pauvres des sortes de nababs. Qu’ont-ils à se plaindre, quand ils ont TOUT ?!...
 

 

C’est sûr ! D’ailleurs, l’illégitimité de la contestation n’est flagrante qu’aux yeux de gens qui ne se battent pas pour autre chose que pour garder les places qu’ils tiennent depuis quelque coup tordu et qui, de cette place, disent aux autres : “Vous n’êtes, vous, qu'à vous plaindre pour RIEN ! Ailleurs, oui ! l’on se bat ! à la kalach ! et c’est autre chose !” ... eux qui n’auront jamais été que du bon coté du manche, boutiquiers en tous genres, y compris celui de la “révolution”, dont l’authenticité ne saurait se trouver qu’outremer, dans des pays où la brutalité de la domination ne prend en effet de gants avec personne qu’elle doit écarter ou soumettre.
Seuls ceux qui doivent se battre pour vivre ont besoin et accès à la conscience historique. Ceux d'en face, accrochés à leurs miettes, énormes ou microbiennes, veulent ignorer, ignorent, du simple fait qu’ils sont, le plus généralement, sans aucune culture historique - que pourrait-elle bien leur rapporter ? - que si la domination, en Occident, prend encore quelque gant, la nature du rapport qu'elle suppose ne diffère en rien, quel que soit son degré de violence. Simple question d'opportunité de méthodes, quand des luttes sanglantes ont eu lieu - pas moins de deux guerres mondiales, plus de soixante millions de victimes, pour écraser un mouvement prolétarien qui commençait de se montrer un peu trop pertinent dans sa mise en cause du Kapital - qui ont amené la domination à élaborer des moyens plus sophistiqués que la seule démonstration de force.

Pour s'être mis à couvert, délibéremment hors-champ - comme en ce cinéma qu'il affectionne décidément tant - le rapport de domination n'est en rien hors-jeu. Toute la persuasion langagière et la séduction marchande, dans la plénitude et la variété de son déploiement, y auront grandement contribué.

C’est à l’heure où cette séduction commence de ne plus suffire que la domination DOIT en venir aux mots orduriers et aux bonnes vieilles recettes de l’intimidation en tous genres.
Voilà, en quelque sorte, un signe plutôt rassurant, qui présage de ce que la tranquillité - et aussi bien l’hypocrisie qu’elle recouvre - n’a plus guère droit de cité.
Les insultes ..., et bientôt, les balles. Il n’y a guère lieu d’en douter, quand leur présence est contenue dès son origine dans la nécessité, pour la domination, de DURER.


Quant à l’agitation fascisante, elle est bien sûr  toute entière la marionnette de cette droite battant faux pavillon (False flag, disent les pirates anglais) aujourd'hui aux manettes en France, et qui appelle l’extrême-droite à sa rescousse, tant la voici manifestement incompétente et stupide devant les nécessités de ces temps, en lesquels elle préfère user, comme toute la droite qui l’aura précédée en cette Vème Supercherie, de brutalité anti-sociale, puisque, manifestement, elle n’a plus d’autre choix.(4)

 

220px-Bundesarchiv Bild 183-1989-0718-501, Gustav Noske und

Gustav Noske (droite) en discussion avec le général Walther von Lüttwitz.

(Source Wikipédia)

 

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NOTES, SOURCES & LIENS

 

1 - Voir article "Boutefeu"

 

2 - Il est, cependant, un autre axe sur lequel doit porter l'attention : non pas le niveau de la provocation aussi grotesque que sommaire - comparer qui que ce soit à un singe est si éculé qu'il fait plutôt penser à la tentative malheureuse d'un collégien en mal d'imagination, qui n'a d'autre ressources intellectuelles et culturelles que de se tourner vers des classiques de cour d'école - mais ce qu'elle provoque d'instrumentalisation, de "droite" comme "de gauche", qui témoigne, en tout premier lieu de l'affligeante déliquescence de cette prétendue pensée politique : élever un pet nauséabond à l'étage d'un enjeu électoral devant conduire la politique d'un pays, voilà bien, d'abord, le ridicule de la chose politique, et, tout aussi bien,  la vérité sur le MÉPRIS dans lequel nous tiennent les politiques, qui en dit long, en retour,  sur leur capacité à comprendre leur temps et ses enjeux réels.

L'époque n'est plus, ne leur en déplaise, au racialisme du XIXè, avec ses classifications  pseudo-scientifiques hasardeuses, son évolutionnisme béat, considérant l'homme blanc au sommet de l'évolution du vivant. Deux boucheries mondiales ont quelque peu effrité ce genre de certitudes sur la prétendue "culture européenne"  laissant surgir de ses flancs de telles barbaries. Et s'il y avait à faire des comparaisons aussi bêtifiantes, il est, sans conteste possible, incomparablement plus gratifiant (de grattoir, bien sûr, pour nos amis les "bêtes"), distrayant, instructif de se trouver en la bonne compagnie d'un singe, animal vivant - une qualité certaine, en soi - et facétieux, plutôt qu'en celle de certains individus, dont la fréquentation relève, au pire du trouble psychologique, au mieux de la curiosité toute scientifique d'une étude clinique, in vivo, de certains spécimens étrangement bien conservés - l'alcool, peut-être, y aura présidé ; on connaît ses ravages - du stade de Cromagnon.

 

3 - Voir article "Sidération"

 

4 - D'une pierre, deux coups, si l'on peut dire de ceux qui manient la fronde - en l'occurrence, ce serait plutôt le lance-flammes - voici donc cette droite, ainsi vilipendée sur son maillon le plus faible - parce que sans doute le plus honnête -, remise en selle "de gôche" par l'extravagance affichée de ses prétendus "ennemis", alors même qu'il y avait tout lieu de douter de ce qu'elle fût jamais de gauche, après toutes ses manœuvres et exactions anti-sociales, ses chasses en terre d'Afrique et ses courses poursuites de l'immigré Rom - à la façon de ce qui se pratiquait en d'autres temps, pas si lointains, à l'encontre des Tziganes et des juifs.

 

Quand la dite extrême-droite - cette marionnette soi-disant anti-immigrés -, choisit extrêmement ses cibles, elle s'en prend plutôt à la droiture sous couvert de s'en prendre à la négritude, et à celle-ci plutôt qu'à l'immigration dont elle admire la figure sarkozienne - immigré de première génération, souffrant manifestement du complexe de l'immigré n'ayant de cesse que de s'afficher "plus français que les Français", tout en voulant y transférer les mauvaises manières d'une culture plus agraire, fermée, autoritaire dans sa méconnaisance, son mépris, sa négation brutale de toute l'histoire politique, sociale, migratoire de ce pays avec laquelle il s'ingénia à rompre les amarres pour rejoindre à marches forcées les rives de la Grande Amérique, patrie du Kapital planétaire - , ou même à la figure, pourtant gouvernementale, du très récent immigré catalan Manuel Carlos Valls, né en 1962 à Barcelone (Espagne), naturalisé en 1982. Son grand-père, rédacteur en chef d'un journal républicain et catholique, cacha des prêtres persécutés par les trotskistes et les anarchistes. (Source Wikipédia)

Mais, ainsi que le sait manifestement l'actuel ministre de l'Intérieur, nul ne saurait endosser les "errements" de sa famille, lui qui assume de s'acharner si ostensiblement à faire supporter à des enfants les agissements de leur famille .

 

Publié dans De la Guerre

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