AMEN !...

Publié le par Pim

Du bas-latin, "lui-même issu du grec ancien ἀμήν amến, introduit dans les langues occidentales par les théologiens grecs qui traduisirent la Bible depuis l'hébreu ancien אמן, āmēn « vraiment, assurément! », sa racine ayant donné les noms de « foi » (Emouna), « confiance » (Amana),  formule d'assentiment prononcée à la suite d'un discours général, d'une prière", ce terme a pu être traduit comme l'expression la plus certaine des conservatismes*(1) : "Ainsi soit-il", "Que ta volonté soit faite sur la terre comme chez toi" , "Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles", "Ne changez rien surtout !" et, dernière en date, en notre époqie de "progrès" automobile, "Circulez ! Y'a rien à voir ...."

 

Réalistes, esprits chagrins ou facétieux, selon, certains se contenteraient presque d'un "Par ici la bonne soupe !", tout en ne manquant pas de noter, au passage, la récurrence du phonème comme du radical αμ dans son amusante traduction, plus moderne et devenue si fréquente sous nos cieux grimés d'amariles ferveurs et autres toxiques ex-voto dédiés à Mammon*(2),  "Amène la menue monnaie ! C'est à Moi qu'on paye !"

 

M. Sarkozy de Nagy Bocsa, s'était, quant à lui, signalé par un discours qui avait fait date, vilipendant "l'homme africain de n'être pas assez entré dans l'Histoire !", discours d'un homme de Progrès, s'il en est, puisqu'aussitôt, il fut traduit comme une forme d'assimilation de tout un continent à la préhistoire, habité de quelque Homme des cavernes "qui, depuis des millénaires, vit avec les saisons, dont l'idéal de vie est d'être en harmonie avec la nature, ne connaît que l'éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles" (Allocution de M. Nicolas SARKOZY, Président de la République, prononcée à l'Université de Dakar le 26 juillet 2007).

 

Pour autant, à entendre celui qui, dans la soirée d'hier, 12 juillet 2010, consentit à honorer la nation française de ses lumières, une tout autre interprétation pourrait en être donnée : c'est en fait par une sorte de jalousie à l'égard d'une telle capacité mise à résister à l'Histoire que M. Sarkozy de Nagy Bocsa s'adressait ainsi aux Africains.

Quand M. Sarkozy de Nagy Bocsa dit aux Français gagnés par le doute que deux points ont fait beaucoup de tort à la France ces dernières années, la retraite à 60 ans et les 35 h de travail hebdomadaires, M. Sarkozy de Nagy Bocsa nous livre un numéro de rétropédalage (que l'on se gardera de confondre avec celui de rétrocommission, plus discret, si l'on peut dire) tout à fait anti-historique. Si l'on considère que tous les "progrès", au moins depuis la machine à vapeur, consistent, en effet, à supprimer le travail humain pour le remplacer par celui des machines, c'est-à-dire à LIBÉRER l'homme de cette antediluvienne malédiction que toutes les religions, et notamment la christique, se sont empressées de justifier comme le lot de celui qui doit gagner sa vie à la perdre du fait de la "faute" impardonnable de ses aïeux, on peut admirer - car il le vaut bien - M. Sarkozy de Nagy Bocsa qui fait ainsi l'éloge d'un retour à cette malédiction divine, en dépit des progrès réalisés depuis la machine à vapeur.

 

De fait, ce que M. Sarkozy de Nagy Bocsa défend ainsi ce n'est nullement le travail en soi - dont il ignore évidemment tout, au point de prétendre donner le change en donnant à voir une simple agitation -  mais seulement l'idée que s'en font ceux qui, disons, "l'emploient" (le terme est, certes, ici, un peu inadapté, mais faisons simple), à savoir que le travail reste encore, avec la religion qui le justifie, le meilleur moyen d'instrumentaliser celui que l'on entend maintenir dans sa condition de soumission. Aussi, du point de vue des classes possédantes, et de leurs commissionnaires aux affaires, tout doit-il être tenté pour SAUVER le travail humain quand toutes les forces déclenchées par le capital ne peuvent que le supprimer.

 

Furieux dilemne qui nécessiterait, en effet, d'autres talents que ceux ici déployés à grands renforts de paillettes et de méthode Coué*(3). On comprend aussi bien que tout ce que l'on a cru entendre est  ce  "Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles", "Nous nous employons à faire nettoyer par nos gens les écuries de nos garden-party ..." "Circulez ! Y'a rien à voir ....",etc ...etc ... "

 

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*(1) - Au sens que ce terme a toujours eu, c'est-à-dire non un immobilisme, mais bien plutôt une idéologie et une pratique qui lui est associée dans l'unique perspective de la conservation du même RAPPORT DE FORCES, ce en dépit des forces qui tendent, inéxorablement à destabiliser l'ordre en place.

C'est précisément par la DESTRUCTION de ces forces que le conservatisme s'exprimera, afin que RESTENT EN PLACE ceux qui en font leur cheval de bataille, ainsi que l'exprime très explicitement le sigle du parti au pouvoir en France, l'Union pour se Maintenir au Pouvoir.

Que ceux qui entendent préserver la planète et ses forces de vie de la destruction se voient aujourd'hui rangés dans les rangs des "conservateurs" est sans doute moins une ironie de l'Histoire que l'expression de la confusion intéressée qui règne et entend, au niveau des mots mêmes qui devraient nous exprimer, renverser les rôles en faisant passer les forces de vie pour des forces anti-progrès, obscurantistes et n'ayant pour seul objectif que de s'opposer à la libération de l'humain. En un mot, un retournement de sens, tel que M. Sarkozy de Nagy Bocsa en fait la démonstration dans ses discours quand il taxe ses adversaires des reproches qu'on ne peut manquer de lui adresser. Mais il est bien certain que s'opposer à la destruction systématique de la vie, telle que la réalise, avec une ampleur rarement atteinte, sinon dans des épisodes comme Bhopal ou Tchernobyl, la marée noire du Golfe du Mexique  ne relève pas d'un "conservatisme" mais est, bien plutôt, une résistance à la destruction, une force de vie, contrainte, par tant d'abandons accumulés au fil de trahisons et renoncements, de se résoudre à une position défensive.

 

*(2) - On pourrait tout aussi bien s'amuser de ce que le terme Aman est aussi bien le service de renseignement militaire israëlien qu'en arabe il signifie l'octroi du pardon à un ennemi en échange de ... sa soumission !... Voilà au moins un bel exemple de ce qu'il convient de faire savoir pour le maintien d'un sain rapport de colonisateur à colonisé.

 

*(3) - Serait-ce pour cette raison que cette feuille de chou, manifestement troublée de la faillite de la prestation de son champion aux affaires, en vient à commettre un lapsus linguæ : "M. Sarkozy a-til eu raison de d'exprimer à la télévision ?" !!!...

Publié dans De la Représentation

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